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Au-delà des spectacles : traces de vie quotidienne et usages polyvalents des édifices de spectacles dans le monde romain
Emmanuelle Rosso  1, 2@  , Eloïse Letellier-Taillefer  1, 2@  
1 : Rome et ses Renaissances : Art, archéologie, littérature, philosophie
Sorbonne Université
2 : Sorbonne Université - Faculté des Lettres - UFR Histoire de l'art et archéologie
Sorbonne Université

Les édifices de spectacles romains, cirques, théâtres et amphithéâtres majoritairement, constituent des marqueurs bien connus d'une culture urbaine partagée que les Romains désignaient sous le nom d'urbanitas. Les spectacles, donnés dans le cadre des ludi qui rassemblaient toute la communauté des cités selon un calendrier partagé, ou bien à l'occasion de munera offerts par les élites urbaines au cours de leur carrière politique ou lors d'événements privés, rythmaient le quotidien de toutes les villes romaines et pouvaient drainer des spectateurs à l'échelle locale voire régionale. Courses de char, chasses et combats de gladiateurs, spectacles dramatiques (tragédie, comédie, mime, pantomime) et autres performances dites mineures qui pouvaient les accompagner sont assez bien documentés par les sources textuelles et iconographiques et connurent un succès populaire non démenti jusqu'à la fin de l'Antiquité. Les modalités précises de leur déploiement concret au sein des édifices conservés sont parfois plus difficiles à cerner archéologiquement, faute de traces matérielles toujours tangibles. 

Mais ce qui nous intéressera ici n'est pas tant le fonctionnement des édifices pour l'accueil de ces spectacles et de leurs acteurs comme de leurs spectateurs, mais plutôt leurs usages comme espaces publics, au quotidien. Relevant d'un statut juridique particulier, qui les maintenait hors de toute propriété privée comme publique, ils constituaient des infrastructures pérennes que les cités se devaient de gérer sur le long terme, même après la prise en charge éventuelle de leur construction ou de leurs rénovations par des évergètes privés. L'archéologie permet parfois de prouver que leurs structures imposantes, en particulier les espaces aménagés dans les substructions qui pouvaient soutenir la pente des gradins, pouvaient effectivement rester ouvertes en dehors des spectacles. Elles pouvaient être mobilisées, officiellement ou de manière plus spontanée, pour d'autres activités plus quotidiennes : rassemblements ou réunions, commerce, promenades et loisirs, accès à l'ombre, à des fontaines ou à des latrines etc. Bien sûr, avec le déclin des spectacles à la fin de l'Antiquité, ces pratiques d'appropriation des différents espaces de ces monuments pour d'autres usages se multiplièrent. 

L'analyse fine des structures bâties, des inscriptions officielles ou des graffiti lorsqu'ils sont conservés, ou encore du décor voire du mobilier parfois retrouvé dans les édifices de spectacles permet de s'interroger sur la vie quotidienne des édifices de spectacles : qui les fréquentait en dehors du public des spectacles ? qu'y faisait-on lorsqu'ils n'accueillaient pas ces grands rassemblements ? Comment les cités pouvaient-elles « rentabiliser » ces structures tout le reste de l'année ? Comment leurs habitantes et habitants investissaient-ils ces espaces publics en usagers et non seulement en spectateurs ? 

Les intervenants de cette session chercheront à mettre en commun leurs réflexions sur ces questions à travers des études de cas issus de contextes particulièrement bien préservés ou encore par le biais d'enquêtes synthétiques ciblées sur tel ou tel aspect des usages « indirects » de ces édifices incontournables des villes romaines, trop souvent considérés uniquement pour leur fonction spectaculaire. On se placera ainsi dans une perspective d'anthropologie des espaces publics urbains, centrée non seulement sur les commanditaires et institutions régulatrices, mais aussi sur l'investissement des lieux publics par leurs usagers.


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