« Bruits de couloir » : les graffiti du couloir des théâtres de Pompéi, du corpus épigraphique à l'approche anthropologique d'un espace public
Louis Autin  1@  , Eloïse Letellier-Taillefer  1@  , Marie-Adeline Le Guennec  2@  
1 : Rome et ses Renaissances : Art, archéologie, littérature, philosophie
Sorbonne Université
2 : Université du Québec à Montréal = University of Québec in Montréal

Dans le cadre de nouvelles recherches en cours sur les deux théâtres de Pompéi – le grand théâtre en plein air et le petit théâtre couvert – le projet « Bruits de couloir » (Sorbonne Université/ISAntiq – Université du Québec à Montréal – École française de Rome), entamé sur le terrain en 2022, a entrepris l'étude globale et pluridisciplinaire d'un exceptionnel corpus de graffiti antiques. Incisées dans l'enduit peint des deux murs du grand couloir d'accès aux deux théâtres (VIII 7, 20), 273 inscriptions textuelles et figurées, accumulées et souvent enchevêtrées, encore pour une bonne partie lisibles in situ, malgré la dégradation progressive des parois, conservent des échos de la vie quotidienne de cet espace, depuis la fin de la République et probablement jusqu'aux derniers jours de Pompéi. Nous en proposons une relecture non plus fragmentée, à l'instar des entreprises de catalogage épigraphique qui nous ont précédés, mais globale et spatialisée, pour interroger le fonctionnement de cet espace public comme un espace vécu : lieu fonctionnel et de passage, mais aussi, comme le révèlent ces inscriptions, espace de séjour, de communication et d'échanges.

Après une présentation du dossier et de la méthodologie, nous reviendrons par plusieurs études de cas sur ce que ces graffiti disent d'un lieu fortement intégré dans le quartier des théâtres, mais aux fonctions multiples dans l'espace urbain. Nous nous interrogerons ainsi sur l'accès permanent à cet espace, en croisant l'étude du bâti et l'apport des inscriptions textuelles, dont plusieurs associent des indices de séjour (habitare) à des déictiques de proximité (hic). Il s'agira ici d'analyser la fonction de ce lieu à la lumière du statut particulier dont jouissaient les deux théâtres proches, qui, comme tous les théâtres du monde romain, devaient demeurer accessibles à tous, au-delà des seuls moments festifs qu'ils accueillaient. Nous envisagerons ensuite les apports de ce corpus à l'histoire « par en bas » (from below), à la lumière des problématiques relatives aux sociabilités ordinaires et à la culture populaire (et à son rapport dialectique à la culture légitime) qu'il engage. Ce faisant, nous nous focaliserons sur le profil des usagers du couloir. Il est certes impossible de déterminer à quel point ceux-ci se confondent avec les usagers des théâtres eux-mêmes, eu égard à l'absence d'allusions claires aux activités théâtrales et aux limites patentes de l'approche prosopographique appliquée à notre corpus. En revanche une lecture anthropologique de ce dernier révèle l'importance de l'univers mental des spectacles en général dans le choix des thèmes des graffiti figurés aussi bien que textuels par les scripteurs.



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